Bellouty, l’élève devenu charretier

UNICEF Mauritanie
5 min readMay 29, 2020

Camp de MBerra — Septembre 2019. Bellouty était un enfant comme les autres. Sa vie a basculé le jour où son père est décédé. Lorsque sa mère s’est remariée, elle a dû quitter le foyer en laissant ses 3 enfants avec leur grand-mère. Rencontre avec un jeune garçon au parcours brisé.

« Je m’appelle Bellouty, j’ai 14 ans. Nous sommes arrivés au camp en 2012. On est venus à pieds, les mains vides, avec ma grand-mère et mes deux frères. J’allais à l’école avant. J’ai suivi les cours jusqu’en 3e année fondamentale. »

Le camp de réfugiés de M’berra a vu le jour en 2012 sous l’impulsion de la communauté humanitaire présente en Mauritanie pour faire face à l’afflux de réfugiés. Depuis, plus de 50.000 maliens y ont trouvé refuge. Comme eux, le jour où les conflits ont éclaté, Bellouty a fui son Mali natal avec ses deux frères et sa grand-mère. Il s’en souvient très bien. C’était en 2012, il avait 7 ans.

“J’ai dû arrêter l’école pour aider ma famille…”

« Ma grand-mère était trop faible et trop fragile pour travailler, alors nous nous sommes vite retrouvés à cours d’argent. J’ai dû arrêter l’école pour aider ma famille. C’est comme ça que je suis devenu charretier, comme mon grand-frère avant moi. »

On les appelle les enfants charretiers. Ils ont entre 13 et 17 ans. Ils sillonnent la brousse pendant 15 à 20 jours pour « faire du bois » : ramasser des branches sèches qu’ils brûlent ensuite pour les transformer en charbon.

« On part à deux ou trois personnes généralement. On a tous à peu près le même âge. Nous sommes à 4 jours de charrette de l’endroit où on fait du bois alors parfois on part 20 jours de suite, le temps de remplir la charrette. »

“Nous n’avons pas beaucoup de provisions […] alors il faut se rationner. Les conditions sont dures.”

Pendant toute la période où ils quittent leur domicile les enfants sont livrés à eux-mêmes ce qui les rend particulièrement vulnérables. Sur leur parcours ils peuvent faire face à toute sorte d’imprévus allant de la maladie à l’enrôlement par des groupes armés, fréquents dans cette région.

« Le matin on se lève entre 5 heures et 7 heures et on commence le travail. On prend le bois, on le brûle, on remplit ensuite les sacs de charbon et ainsi de suite. Je descends (comprendre je finis le travail) à 1 heure et je recommence de 16 heures jusqu’à minuit. Au camp, une charrette entière rapporte environ 2000 ouguiyas (soit environ 50 euros), alors plus on travaille, plus on gagne d’argent.

La nuit on dort sur une natte, sous un arbre ou à l’ombre de la charrette. Nous n’avons pas beaucoup de provisions : du riz, des biscuits, des arachides et quelques condiments. Alors il faut se rationner. Les conditions sont dures. Parfois la charrette se gâte (comprendre se casse) et on ne peut plus avancer. On doit tout laisser sur place et faire marche arrière pour trouver de quoi réparer. »

“Je ne veux plus faire ce travail, j’aimerais retourner à l’école pour apprendre.”

Pendant 20 jours les enfants vont travailler au rythme éreintant de 14 à 16 heures quotidiennement pour un revenu journalier moyen de 100 ouguiyas (environ 2,50 euros). Les mauvaises rencontres Bellouty dit ne pas en faire. D’ailleurs il n’a pas d’avis sur la question des conflits. Pourtant, pour lui et ses amis le risque est bien réel. Mais il préfère se concentrer sur ce qu’il a à faire en espérant un jour pouvoir reprendre les cours.

« Je ne veux plus faire ce travail, j’aimerais retourner à l’école pour apprendre. Mes amis me disent que ce n’est pas bon, que ma place est à l’école pour apprendre. Mais je n’ai pas le choix. Mon rêve ? J’aimerais apprendre à faire de la moto un jour. »

Depuis sa création le UN Peacebuilding Fund a permis à #UNICEF de venir en aide aux jeunes réfugiés du camp de Mberra. Dans le cadre du projet de « Renforcement des capacités locales pour la prévention des conflits » les ONG locales identifient les femmes et les enfants en situation vulnérable et leurs proposent un appui matériel et un suivi psychosocial afin de leurs venir en aide. L’une d’elle conclut :

« Lorsque nous avons identifié le jeune Bellouty il y a quelques mois nous lui avons demandé comment nous pouvions lui venir en aide. Nous lui avons ensuite apporté une chèvre laitière pour diminuer la charge qui pèse actuellement sur ses épaules. Lorsque la chèvre aura mis bas la grand-mère vendra les petits et pourra développer son activité. Ensuite nous espérons que Bellouty retrouvera rapidement le chemin de l’école. »

#PourChaqueEnfant, la protection

📸 UNICEF Mauritanie/R.Pouget/2019

--

--

UNICEF Mauritanie
UNICEF Mauritanie

Written by UNICEF Mauritanie

L'Unicef est une agence des Nations-Unies qui a pour vocation d'assurer à chaque enfant santé, éducation, égalité et protection.

No responses yet